On a peu à peu mis cette histoire de taxe sur le carburant de côté, pour aborder des sujets plus intéressants (à mon sens) tels que ces personnes qui dorment toujours dans la rue, alors que vous aviez promis le contraire, ou ceux qui doivent mendier pour manger, alors même qu’ils travaillent, ou encore le manque d’effectif dans les hôpitaux, les écoles… La fièvre a gagné les jambes. Des « gilets jaunes » ont compris que le blocage du peuple par le peuple n’amenait que la discorde… et que si les gens sont aussi réticents à ces blocages, c’est qu’ils sont eux aussi pris au cou par l’urgence pécuniaire de se rendre au travail. Le 24 novembre, ils ont abandonné leurs véhicules (et, symboliquement, cette revendication première sur le prix du carburant), et ont utilisé leurs jambes fiévreuses pour se faire entendre dans les rues, jusqu’à Paris. Vous auriez eu l’occasion de vous adresser à eux le 27 novembre. C’était le bon moment ! Et avec un peu de poudre de perlimpinpin, la même que celle que vous avez utilisé pour être élu, vous auriez pu calmer tout ce petit monde énervé, j’en suis certaine, car vous êtes doué pour détourner les choses. Mais, Dieu merci, votre talent d’orateur n’a d’égal que votre ego, et tel l’enfant borné que vous êtes, vous avez répondu sans avoir écouté. Vous nous avez parlé pendant 57 longues minutes soporifiques de la transition écologique… Et c’est, à mon sens, ce jour-là que vous avez réussi à vous mettre tout le monde à dos. Car, la transition écologique, c’est un sujet que les gens comme moi qui n’aiment pas trop l’automobile, affectionnent particulièrement… Du coup, quand vous tentez de faire croire que la taxe sur le carburant sert à la financer, nous savons, mathématiquement, que c’est faux. La fièvre gagne notre ventre quand vous parlez de nos enfants, du mauvais air qu’ils respirent. Quand vous tentez, encore une fois, de nous faire croire que c’est à nous de fournir un effort supplémentaire contre cela, vous nous donnez tout simplement la nausée. Car nous savons bien que notre tri sélectif, nos économies de déplacement, nos achats équitables etc., ne feront rien contre vos avions, vos déforestations, votre « oui » à la mine d’or industrielle en Guyane… et j’en passe. Macron, ce sont les pauvres qui font attention à ne pas trop rouler, à ne pas trop gaspiller, à bien fermer rapidement le robinet, à éteindre la lumière… Nous ne sommes pas les pollueurs, mais dans le fond, vous êtes déjà au courant, n’est-ce pas ? Alors bravo, car grâce à votre si mauvaise intervention, vous avez convaincu les endormis de s’indigner de leur impuissance. L’impuissance, car nous ne sommes rien, nous ne pouvons rien, nous sommes pieds et mains liés par ce calendrier qui dit qu’au premier du mois nous devons être au travail sans réfléchir, afin que le 20 nous soyons raisonnablement à découvert, pour ramper péniblement jusqu’au premier du mois suivant, ainsi de suite, laissant s’envoler ainsi notre vie, nos convictions, notre force d’agir… et dans ce sommeil longuement installé, nous avons vu fleurir un cauchemar qui a réveillé en sursaut bon nombre d’entre nous. Je ne porte pas de gilet jaune, ou de n’importe quelle autre couleur, et j’ai suivi attentivement les manifestations car elles ne sont plus celles des gilets jaunes contre les taxes, elles sont devenues celles du peuple contre tout ce qui nous est insupportable.Le 1er décembre, je n’ai pas pu échapper au martèlement d’images bien choisies par vos médias… sous tous les angles possibles : les détériorations de l’arc de triomphe, des magasins, les violences etc.… et cela, Macron, c’est la fièvre qui a gagné nos têtes ! Cette fièvre que vous avez laissée s’installer, et que vous avez alimentée même par votre attitude.
Votre réponse est absolument merveilleuse d’ironie et brille tout autant que votre absence, au sens littéral du terme. Vous qui appréciez le théâtre, je vous reconnais un don tout particulier pour jouer le pathos, et provoquer l’hilarité générale… un rire jaune, bien sûr ! Vous dites : « Ce qu’il s’est passé aujourd’hui à Paris n’a rien à voir avec l’expression pacifique d’une colère légitime. Aucune cause ne justifie que les forces de l’ordre soient attaquées, que des commerces soient pillés, que des bâtiments publics ou privés soient incendiés, que des passants ou des journalistes soient menacés, que l’Arc de Triomphe soit ainsi souillé. Les coupables de ces violences ne veulent pas de changement, ne veulent aucune amélioration, ils veulent le chaos… » Et vous portez là l’exacte pensée des personnes qui ont participé ou regardé ces manifestations… Car le coupable de ces violences, si on doit en désigner un seul, c’est bien vous. De votre échec à comprendre le peuple résulte cette fièvre généralisée. De vos réponses, toujours à côté de la plaque, de votre mépris et de votre arrogance permanente. Vous avez donné tous les arguments au déchaînement de la haine. Car, quand les paroles ne suffisent plus, que les rassemblements pacifiques reviennent à « pisser dans un violon », que reste-t-il au peuple, si ce n’est la haine ? Vous incarnez un rôle à merveille, le plus grand de votre vie sûrement. Vous avez réussi, bravo à vous, à devenir la richesse sourde et arrogante. Vous êtes l’insulte au peuple, vous êtes le mépris, vous êtes l’incompréhension. En cela, vous avez permis à des tas de personnes de clarifier leur pensée. Depuis des années elles souffraient du sentiment d’injustice, sans jamais trop savoir comment l’exprimer… « C’est la finance » ou « ce sont les grands patrons », ou encore « le système ». C’est vague tout ça et, dans le fond, on en revenait à dire « c’est la vie », par fatalisme. Il y a maintenant un nom qui sert de symbole à tout cela : Macron. Votre ego en avait rêvé, n’est-ce pas, d’être un symbole ? Vous êtes tout cela, la finance, le grand patron, le système. Et vous vous êtes donné un mal fou pour endosser toutes ces casquettes. On vous compare même à Louis XVI, je vous espère flatté, car cela sera le seul bénéfice de cette comparaison. Félicitations, vous êtes dans l’impasse ! La fièvre est totale et je doute que vous puissiez l’endiguer si facilement… Geler les taxes sur le carburant, c’est trop tard ! Accorder 20 € de plus par ci, par là, c’est trop tard ! Le peuple a enfin ouvert les yeux et veut bien plus que cela. Il veut vous voir tomber, mais non pas vous en tant que personne, mais vous avec tout ce que vous représentez. Le peuple veut bouleverser le système, la finance, les lobbies… la monarchie déguisée. Nous voulons travailler pour nous. Pour nos frais médicaux, nos écoles, notre écologie ! Nous ne voulons plus payer votre train de vie, vos dépenses démesurées, vos mensonges, votre « traque à la fraude des pauvres », tandis que 80 milliards d’évasion fiscale perdurent chaque année… Vous êtes un mac, Macron. Vous nous mettez à la rue, pour ne pas dire sur le trottoir, et vous nous incitez à traverser pour trouver du travail… Nous travaillons dur, jour après jour, et nous payons 500 € de loyer pendant 50 ans pour arriver aux 300 000 euros de moquette de l’Élysée.
Et maintenant, que faire ? C’est une vraie question… Si j’avais écrit la pièce, j’aurais parié sur votre mort (symbolique) à la fin. Parce que le peuple aime le drame et le souhaite secrètement dans ses entrailles prises par la fièvre. Mais cette fin est mauvaise, et me fait craindre le petit brun moustachu déguisé en blonde Marianne de notre pays… Alors que dire ? Bon courage, Macron, je n’aimerais pas être à votre place ! Sans mon respect, je vous accorde au moins l’empathie que l’on doit à un petit enfant buté qui a cassé son jouet.